Qui aime le design et les belles matières connaît Ado Chale. Ce créateur belge autodidacte est aujourd'hui exposé à Bozar dans une petite rétrospective bien méritée, dans le cadre de Design September. On y voit principalement le mobilier et les plateaux de tables en résine et pierres qui sont sa marque de fabrique depuis les années 1960.
Né Adolphe Pelsener en 1928, enfant de la guerre, Ado Chale se retrouve orphelin à 12 ans. Ferronnier de formation, il se dirige vers la sérigraphie dans les années 1950. Il découvre la minéralogie à la faveur d'un voyage en Allemagne. Son épouse gemmologue, Huguette Schaal (1929-2011), ouvre en 1961 la galerie Chale rue de Livourne, à Bruxelles. Ado et sa famille adoptent le patronyme Chale en référence à cette première galerie. On y trouvait des bijoux d'amis créateurs et les premières créations d'Ado Chale lui-même.
Chale commence à collecter des pierres et des minéraux sur les plages du Pas-de-Calais et chez les tailleurs de pierres précieuses d'Idar-Oberstein, puis plus tard durant ses voyages. Ce goût de la chine, de la collecte, le bonheur de trouver des matériaux, qui le fascine, sont à l'origine de son inspiration. Il va commencer à assembler ces citrines, topazes, agates, turquoises mais aussi pastilles ou fragments d'os, grains de poivre ou boutons de nacre pour créer des surfaces pour des tables basses ou hautes. Ces matériaux, emprisonnés dans les résines colorées qu'il a mises au point, sont ensuite polis pour déployer tout l'éclat de leurs couleurs.
Dans la Salle de Conférence, à droite du grand escalier en marbre au centre du Palais des Beaux-Arts dessiné par Horta, voici donc, en une présentation précieuse, une trentaine d'œuvres d'Ado Chale, comme autant de bijoux. Beaucoup de plateaux de table, parmi lesquels la célèbre Goutte d'eau, dont les rainures en cercle évoquent les cercles que tracent sur une surface d'eau une goutte qui tombe. Cette délicate évocation est coulée en bronze ou en aluminium et ce vigoureux contraste des matières ajoute au charme de la création. Chale est autodidacte. Il a traversé les années 1960, 1970 et jusqu'à aujourd'hui en n'en faisant qu'à sa tête. "Du plus loin que je me souvienne, j'observe cet électron libre diffuser son art, sa vision optimiste de la vie", écrit sa fille Ilona Chale, qui travaille aujourd'hui à ses côtés et est l'initiatrice de cette exposition. "La beauté transpire de partout, qu'elle soit de l'âme, d'un palais d'Orient imaginé, d'un objet ethnique posé nonchalamment sur le bord d'une mosaïque de jade ou simplement de l'expression d'un enfant."
Voici aussi un formidable meuble Boule, beau comme une sculpture, entièrement recouvert d'une mosaïque de schiste. Un bar en mosaïque de lamelles d'os et son canapé assorti datant de 1983. Des petites vitrines créées pour Hermès. Chaque objet irradie de la puissance des matériaux utilisés. Les pieds de table en métal sont ornés parfois d'une large boule en bronze poli. Naviguant toujours avec élégance entre art et arts décoratifs, design et sculpture, Chale a créé un univers organique, puissant, enraciné dans la matière. La poésie de ses créations fait fi de toutes les modes.
Les créations d'Ado Chale ont été achetées par les cours royales belge, du Royaume-Uni, des Pays-Bas, d'Espagne, etc. Il a travaillé pour de grandes marques comme Hermès, Dior, Chanel, Vuitton ainsi que pour des architectes d'intérieur et décorateurs séduits par son univers si personnel. On trouve de temps un temps une belle pièce à la Brafa ou à la Tefaf. Toujours merveilleusement bien intégrée au mobilier d'autres époques.
Ado Chale
Alchimiste. Artisan. Designer.
Bozar
23 rue Ravenstein
1000 Bruxelles
Jusqu'au 24 septembre
Du mardi au dimanche de 10h à 18h
www.bozar.be
Fondatrice
Voir et regarder l’art. Puis transformer en mots cette expérience première, qui est comme une respiration. « L’écriture permet de transmuter ce que l’œil a vu. Ce processus me fascine. » Philosophe et sculptrice de formation, elle a été journaliste entre autres pour L’Echo, Marianne Belgique et M Belgique. Elle revendique de pouvoir écrire dans un style à la fois accessible et subjectif. La critique est permise ! Elle écrit sur l’art, la politique culturelle, l’évolution des musées et sur la manière de montrer l’art. Elle est aussi artiste. Elle a fondé le magazine Mu in the City en 2014.
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