Le centre d'Art du Rouge-Cloître propose une plongée dans l'œuvre méconnue d'Adrien Van de Putte, un peintre brabançon qui a jonglé avec les styles sans jamais perdre la singularité de son regard.
L'histoire de l'art est jalonnée de ces artistes injustement oubliés ou négligés pour des tas de raisons, souvent mauvaises. Adrien Van de Putte est l'un d'eux. S'il a laissé derrière lui une œuvre abondante réalisée entre les années 1930 et 1980, il n'a jamais voulu en faire son métier. Fonctionnaire à la Province de Brabant, il consacrait ses temps libres à sa passion pour la peinture. A l'écart des contraintes du marché, il a tout au long de sa carrière oscillé entre différents styles où l'on relève des échos de l'impressionnisme, du fauvisme, et encore du constructivisme, du surréalisme, voire de l'art naïf. Un éventail de styles dans lesquels il a puisé avec le sérieux d'un fin analyste de l'histoire de l'art et la gourmandise d'un enfant dans un magasin de bonbons.
Curateur de l'exposition, son petit-fils Emmanuel Van de Putte a préféré tourner le dos à la présentation chronologique pour mettre en évidence la cohérence de l'œuvre au-delà des styles. Issues de collections privées, de la famille ou de l'atelier, les peintures non datées sont rassemblées par thématiques ou par affinités chromatiques. Parmi ses sujets privilégiés, on retrouve les paysages brabançons autour d'Overijse, où il est né et où il vivait et peignait. Ce sont des paysages de maisonnettes idéalisés, comme lissés par la mémoire et rythmés par des arbres élancés.
Plus que le sujet, c'est d'abord l'approche picturale qui fait la singularité de l'œuvre d'Adrien Van de Putte. Que ce soit avec un groupe de maisons, des bateaux ou des roulottes de kermesse sur la place du village, le peintre procède très souvent par accumulation. Comme s'ils étaient vus à travers l'œil d'un kaléidoscope, les volumes se chevauchent et semblent s'agglutiner l'un à l'autre par la seule magie de la couleur. S'il reste un réaliste, Adrien Van de Putte se détache du réel pour faire apparaître au bout de son pinceau une réalité alternative où le seul espace qui compte est celui qui est circonscrit dans le cadre et le plan du tableau.
Si son voyage part du réel, à l'arrivée sur la toile tout est possible, comme ces curieux octaèdres pointus qui surgissent d'une place à l'italienne ou alors cet escalier qui spirale vers le ciel dans une de ses toiles d'esprit surréalisant. Ce sont les tons pastel et automnaux qui dominent sa palette, mais celle-ci se caractérise aussi par un velouté qui éteint toute la brillance qui transparaît souvent de l'huile et du vernis. Esprit curieux et astucieux, il développera une technique particulière par laquelle, grâce à un liant de son invention, il pouvait fixer et matifier ses pigments en se passant d'huile ou d'eau. Ce mélange, qu'il baptisa chromatine, lui valut une exposition à New York dans les années 1950, grâce à un prix qui lui avait été décerné par Raymond Duncan, un galeriste américain de Paris. L'œuvre primée, Béguinage à Overijse, ainsi qu'une autre chromatine, Kermesse au village, sont reprises dans l'exposition.
Avec le recul du temps, l'œuvre d'Adrien Van de Putte reprend des couleurs et apparaît dans toute sa poésie et son refus des modes.
Adrien Van de Putte,
Arpenteur du réel
Centre d'Art du Rouge-Cloître
4 rue du Rouge-Cloître
1060 Bruxelles
Jusqu'au 18 juillet
Du mercredi au vendredi de 14h à 17h
Samedi et dimanche de 14h à 18h
www.rouge-cloitre.be
Rédacteur en chef
Il n’imagine pas un monde sans art. Comment sinon refléter et traduire la beauté, la douceur, la sauvagerie et l’absurdité des mondes d’hier et d’aujourd’hui ? Écrire sur l’art est pour lui un plaisir autant qu’une nécessité. Journaliste indépendant, passionné et curieux de toutes les métamorphoses artistiques, il collabore également à Bruzz et COLLECT
Pour rester au courant de notre actualité,
inscrivez-vous à notre newsletter !
Faites un don pour soutenir notre magazine !