Le grand artiste camerounais Barthélémy Toguo revisite sa carrière chez Nosbaum Reding et nous invite à chercher la partie manquante.
Régulièrement présenté lors de foires ou d'expos de groupe, Barthélémy Toguo n'a plus bénéficié d'expo monographique à Bruxelles depuis près de deux décennies. C'est chose faite chez Nosbaum Reding avec The Missing part. On y découvre un patchwork créatif qui rassemble de nombreuses facettes de la production du grand artiste camerounais. La partie manquante qui donne son titre à l'expo, « c'est ce qui manque en chacun d'entre nous, comme entre les murs de cette galerie », sourit l'artiste. « Mais j'y vois un élément positif, car c'est ce qui nous pousse à chercher, à évoluer. »
On retrouve dans l'expo ces grandes aquarelles et peintures qui célèbrent la vie dans ce bleu lumineux si caractéristique de l'artiste, les corps dansent sur la toile, goûtent à la sève de la vie, se métamorphosent en racines ou en branches pour célébrer la beauté. Dans cette vision hédoniste, la douleur n'est jamais absente, comme en témoignent les petits clous enfoncés dans la chair comme un rappel que les larmes ne sont pas toujours de joie.
L'artiste présente également une série de portraits sculptés dans des plaques de bois. Ce sont des portraits des habitants du quartier de Bilongué à Douala, au Cameroun. « Ce sont des gens qui vivent un quotidien difficile et qui malgré cela s'en sortent. Je suis revenu à la sculpture que je n'avais plus pratiquée depuis l'Académie de Düsseldorf, où j'avais réalisé des autoportraits sculptés. »
Du bois toujours, avec cette étonnante série de tubes démesurés de Prozac, d'antistress ou de « pommade psy ». « C'est une série qui remonte à 20 ans et que je n'avais jamais exposée. » Elève à l'Académie de Grenoble, l'artiste réagissait ainsi aux ravages de l'addiction dont il a été témoin dans certains quartiers de la ville. Dans la même pièce, une curieuse série de plaques métalliques cuites réalisées à Mulhouse. « J'ai travaillé avec des artisans d'une entreprise locale qui ont partagé avec moi leur savoir-faire. Dans ma pratique quotidienne, j'ai besoin de chercher et d'expérimenter de nouvelles techniques pour ne pas m'ennuyer. »
La céramique n'est pas exactement nouvelle pour Barthélémy Toguo. Pour sa participation au Prix Marcel Duchamp en 2016, il avait réalisé des grands vases en collaboration avec une manufacture chinoise. Cette fois-ci, c'est à Malaga qu'il a renoué avec la céramique à l'occasion d'une exposition au musée Picasso. Hauts de deux mètres, les vases se dressent dans la cour comme des sentinelles.
Profondément imprégné des cosmogonies africaines où dialoguent toutes les formes de vie, Barthélémy Toguo est aussi un artiste du monde, sensible aux questions de migration, d'exil et de migration Nord-Sud qui parcourent toute son œuvre comme des racines souterraines.
Bathélemy Toguo
The Missing part
Nosbaum Reding
rue de la Concorde, 60A
1050 Bruxelles
jusqu'au 4 mars
Du mercredi au samedi de 11h à 18h
www.nosbaumreding.com
Rédacteur en chef
Il n’imagine pas un monde sans art. Comment sinon refléter et traduire la beauté, la douceur, la sauvagerie et l’absurdité des mondes d’hier et d’aujourd’hui ? Écrire sur l’art est pour lui un plaisir autant qu’une nécessité. Journaliste indépendant, passionné et curieux de toutes les métamorphoses artistiques, il collabore également à Bruzz et COLLECT
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