Double exposition à la galerie DYS avec deux artistes de la métamorphose. Benoît Huot et ses sculptures-fétiches de tissu et Rithika Merchant avec ses visions d'un monde traversé de symboles.
On croirait entendre de la musique d'une joyeuse fanfare, à moins que ce ne soient des os qui s'entrechoquent. Il y a quelque chose d'exubérant dans les sculptures-assemblages en tissus de Benoît Huot. L'artiste crée un bestiaire de créatures extraordinaires emmitouflées de pièces de crochet de morceaux de tapis et broderies, enturbannées de floches et de pampilles. Des masques aux enluminures textiles sont alignés comme les trophées d'un explorateur de l'inconscient. Au croisement de la farce et du sacré, on peut y voir des objets, d'adoration ou de rituels mystérieux. Fétiches sans frontières, ils multiplient les références sans se soumettre à aucune. Un bélier décoré comme un bus de montagne, chevauché par un mort-vivant vert de gris-gris, tient compagnie à une idole placide prête à arbitrer nos différences. Lors de la dernière foire d'Art Paris, de nombreux visiteurs originaires des Balkans ou d'Asie croyaient souvent y reconnaître leurs propres traditions. Si l'artiste consulte un Guide du Routard, ce serait celui d'un voyageur de l'intérieur, adepte des sentiers infinis et sinueux de l'imaginaire. Benoît Huot est un peintre qui fait de la sculpture. Sensible aux couleurs et aux matières, il assemble les brins de laine comme s'il les sortait de sa palette. Artiste de l'emballage et de l'enveloppement, il se sert d'animaux naturalisés, de masques de carnaval, voire de jouets, qu'il habille de laine ou de couleurs pour les métamorphoser en créations fantasmagoriques. Le déclic s'est produit lorsque, à l'occasion de grands travaux chez lui, il retrouve des cadavres de petits animaux momifiés par le temps. Plutôt que de s'en débarrasser comme un détritus, il décide d'honorer leurs courtes vies en les emballant pour les faire revenir à la vie et reconquérir les imaginaires. Tel un thaumaturge, il récupère dans des vide-greniers ou des brocantes des trophées de chasse, animaux anonymes ensevelis sous la poussière de l'oubli, pour les sacraliser et en faire des créatures uniques.
Une autre métamorphose du vivant est à l'œuvre dans les délicates aquarelles de Rithika Merchant. L'artiste indienne y revisite les personnages et récits mythologiques issus de différentes cultures tant asiatiques qu'européennes. Ce qui l'intéresse, c'est leur puissance narrative toujours en phase avec nos préoccupations contemporaines, notamment quand elles s'inquiètent pour l'avenir de notre planète. On peut trouver dans son travail des réminiscences des planches botaniques, des arts populaires ou des miniatures mongoles. Chez elle, le papier, plus qu'un support, devient aussi matière soumise à des pliages et découpages. Dans ses Métamorphoses, Ovide réenchantait le monde en souvenant de l'âge d'or. Sans aller aussi loin dans le temps, on peut faire un détour par la Galerie DYS.
Metamorphosis
Benoît Huot & Rithika Merchant
Galerie DYS
84 rue de l’Arbre Bénit
1050 Bruxelles
Jusqu’au 23 octobre
Jeudi et vendredi de 11h à 18h
Samedi et dimanche de 12h à 18h
www.galeriedys.com
Rédacteur en chef
Il n’imagine pas un monde sans art. Comment sinon refléter et traduire la beauté, la douceur, la sauvagerie et l’absurdité des mondes d’hier et d’aujourd’hui ? Écrire sur l’art est pour lui un plaisir autant qu’une nécessité. Journaliste indépendant, passionné et curieux de toutes les métamorphoses artistiques, il collabore également à Bruzz et COLLECT
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