Dans sa nouvelle exposition chez Irène Laub, Bernard Villers joue avec les tensions entre la couleur et son support. À voir jusqu'au 25 février.
C'est l'exposition d'un jeune homme de 83 ans. Un artiste qui ne se lasse pas de découvrir, de jouer avec la couleur et d'en expérimenter la perception. Avec la légèreté d'un voyageur sans bagage, il parcourt son œuvre pour en reprendre certains éléments et leur donner une nouvelle jeunesse. Tout est là. Depuis le début. Pour ceux qui connaissent le travail de Bernard Villers, il n'y a pas de surprise, les ingrédients sont connus et pourtant le regard est neuf. Ce qu'il nous prépare dans son atelier avec de la couleur monochrome, du bois, du papier, de la corde, de la ficelle et des cageots récupérés a le trouble de l'évidence. Ce qui paraît simple n'en finit pas de titiller notre perception.
L'exposition rassemble différentes petites séries qui ont en commun le minimalisme de moyens et le maximalisme d'expression. Prenons la série de monochromes jaunes alignés sur un des murs. Chaque panneau de bois se détache du mur par la légère inclinaison de son volume qui fait que le regard glisse sur la surface plutôt que de s'y écraser. Un jaune avec un angle reste un jaune, mais pas tout à fait le même. D'autres carrés de couleur se laissent regarder de haut. Montés sur des roulettes, on les retrouve en arrêt dans la galerie. Il les appelle ses mobiles. Une belle cordelette de couleur permet de les déplacer où on veut. Ils illuminent le sol de la galerie sans demander grand-chose. Et peut-être que le soir, Bernard Villers s'en vient promener ses couleurs pour les baigner dans d'autres lumières.
Dans une autre série, l'artiste joue avec les mots, des mots de rien et de tout avec lesquels il s'amuse à faire sens. Un monochrome rose rouge traversé de la fine déchirure d'un ruban adhésif. Pour écrire ces mots qui font leur apparition dans son œuvre, Bernard Villers est allé rechercher la typo avec laquelle son père, écrivain, tamponnait des phrases sur les murs de son bureau. Les couleurs et les mots appartiennent à des univers cognitifs disjoints qui ici se rejoignent pour créer un autre langage. Dans chacune de ses créations, Bernard Villers crée une tension ludique entre la matérialité du support et l'immatérialité de l'expression colorée. À ses débuts, l'artiste tendait parfois sa toile sur des lattes de bois récupérées sur des cageots de bois. Il s'en souvient dans cette petite série de cageots à fruits sur lesquels sont tendues des bandes de couleur. Du coup, c'est le vide qui fait parler la couleur, le rien qui donne de l'épaisseur au tout.
Bernard Villers
Tout est là
Irène Laub Gallery
29 rue Van Eyck
1050 Bruxelles
Jusqu'au 25 février
Du mardi au samedi, de 11h à 18h
www.irenelaubgallery.com
Rédacteur en chef
Il n’imagine pas un monde sans art. Comment sinon refléter et traduire la beauté, la douceur, la sauvagerie et l’absurdité des mondes d’hier et d’aujourd’hui ? Écrire sur l’art est pour lui un plaisir autant qu’une nécessité. Journaliste indépendant, passionné et curieux de toutes les métamorphoses artistiques, il collabore également à Bruzz et COLLECT
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