La galerie Greta Meert présente trois expositions, deux de l’artiste américaine de renom Louise Lawler et une de l’artiste allemand Johannes Wald.
Louise Lawler signe Distorted for the times et Lights off, after hours, in the dark qui soulèvent des questions intéressantes sur les circonstances dans lesquelles l’art est produit, la manière dont il est présenté et circule dans le monde. Johannes Wald inaugure, quant à lui, Innermost qui interroge le contexte dans lequel l’œuvre est présentée et montre des créations produites à partir de matériaux trouvés dans son atelier. Celles-ci sont à découvrir jusqu’au 30 octobre, dans le nord de Bruxelles, pas loin de la place Sainte-Catherine.
Au rez-de-chaussée, Distorted for the times exhibe deux immenses images en vinyle qui recouvrent deux murs entiers de la galerie. Ces images sont le produit d’un travail d’étirement et de distorsion d’une photographie d’un autoportrait d’Andy Warhol prise par Louise Lawler dans un contexte domestique, chez un collectionneur, en 2004. On retrouve là le travail de cette artiste qui en 2011 commence à modifier l’échelle de ses images pour les adapter aux dimensions des murs sur lesquels elles sont placées et qui, à partir de 2017, choisit d’appliquer des filtres numériques et de déformer les images. Les titres des œuvres manifestent les différents processus de manipulation de l’artiste. Louise Lawler est une des figures de proue du mouvement de l’appropriationnisme. Pour produire son travail artistique, elle part souvent de la photographie d’une œuvre existante. Sa pratique vise aussi à sortir les œuvres de leur contexte habituel.
Au premier étage, Lights off, after hours, in the dark présente une série de photographies prises au Museum of Modern Art (MoMA) de New York lors de la rétrospective de Donald Judd, un artiste américain minimaliste de renommée mondiale. Ces images montrent les œuvres de l’artiste la nuit. Elles ont été réalisées avec une durée d’exposition très longue permettant à l’obturateur de l’appareil photographique de capter l’éclairage des œuvres par la lumière des systèmes d’alarme incendie et des signaux de sortie (EXIT). Les images, très sombres, oscillent entre abstraction et figuration et offrent une version inédite des créations de l’artiste minimaliste. Elles rendent compte de la cohérence narrative de Louise Lawler, à savoir l’idée de l’appropriation d’une œuvre et sa présentation dans un nouveau contexte. Louise Lawler a le mérite de questionner le statut de l’œuvre en s’intéressant moins à l’authenticité de l’œuvre qu’au contexte dans lequel celle-ci est présentée. À plus de septante-quatre ans, son travail reste délibérément brûlant d’actualité !
Enfin, au dernier étage, un artiste allemand d’une quarantaine d’années, Johannes Wald, expose des objets issus de son ancien atelier. Nous découvrons une brique sur laquelle il a apposé une surface métallique. À force de ponçage, la brique devenue réfléchissante reflète l’espace de la galerie et le spectateur lui-même. Ce qui nous a semblé intéressant, c’est l’idée que la brique, retirée de l’atelier, donne à voir un tout autre contexte, celui de la galerie. À travers son œuvre, Johannes Wald cristallise ce qui a été. Comme un travail de mémoire, d’empreinte, Johannes Wald laisse une trace du passé. Ses œuvres permettent de réintroduire, dans l’espace du white cube, une trace réelle d’un atelier qu’il a cessé d’investir. Une œuvre marquante de l’exposition est ce voile de silicone amorphe posé au sol et sur lequel nous pouvons observer les empreintes d’un mur de son ancien atelier. Plus loin, l’artiste utilise aussi la cire pour restituer un élément décoratif de son atelier à travers l’idée du moule, du négatif. L’exposition se concentre sur la présentation d’une série de matériaux du souvenir qui montrent simultanément l’absence et la mémoire d’un lieu, l’atelier.
La galerie Greta Meert offre trois expositions d’une grande cohérence. Des thématiques communes traversent la pratique artistique de Louise Lawler et de Johannes Wald, qui ne sont pourtant pas de la même génération, ni de la même culture. La question de présenter l’œuvre dans un autre contexte semble inhérente au travail des deux artistes. Et, bien sûr, les deux artistes incarnent cette tradition conceptuelle selon laquelle le processus de création de l’œuvre est tout aussi voire plus important que le résultat matériel.
Distorted for the times / Lights off, after hours, in the dark/ Innermost
Greta Meert
13 rue du Canal
1000 Bruxelles
Jusqu’au 30 octobre
Du mardi au Samedi de 14h à 18h
https://galeriegretameert.com/
Journaliste
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