D’une envoûtante beauté, les compositions picturales d’Eric Fourez nous convient à une traversée des stases de l’œuvre au blanc. Porteurs d’un questionnement métaphysique, ses paysages libèrent une réalité tout à la fois naturelle et psychique. La lumière impalpable de l’infinitude est à voir à la Galerie Faider jusqu'au 18 mars.
Le regard du spectateur entre en contact avec un univers pictural qui explore la perception de l’imperceptible ou ce que Leibniz appelle les petites perceptions, lesquelles nous procurent par leur agrégation la perception consciente. Auteur d’une œuvre exigeante, taillée dans la splendeur du silence et de l’épure, déjà exposée à la Galerie Faider, Eric Fourez dévoile des traces de traces, des épiphanies de blanc traversées de mouvements, friselis de vagues, motifs laissés sur le sable par la marée descendante. Tout affleure au visible en donnant abri à la disparition, au travers d’un chant maritime, arénicole, poétique et spirituel qui brouille les frontières entre paysages naturels et contrées psychiques. Dans une archéologie du blanc, de ses nuances, de ses chants, de ses points de retournement, le peintre capte la trouée de l’infini dans l’espace.
Nous suivons les traces déposées par les marées visuelles qui ont éclaboussé son œil, ses sens. Que reste-t-il des flux et reflux de la mémoire ? De la mémoire des lieux, des plages que l’artiste photographie au préalable, mais aussi de la mémoire de l’œil qui enregistre le rythme vital, l’éternel retour des cycles naturels ? Qu’est-ce qu’une empreinte mnésique, qu’est-ce qu’un instantané arraché au sablier du temps ?
Les rythmes des motifs affleurent dans une présence grignotée par l’évanouissement, par l’effacement destinal, dans un équilibre fragile entre résidus d’une apparition et principe inéluctable de disparition. Rien de plus précaire que l’éternité de la vie et de la mort des vagues dont Eric Fourez recueille le mouvement immémorial, le labeur hypnotique. Si les vastes étendues entre abstraction et figuration invitent à l’introspection, à la méditation, la tonalité de la méditation est paradoxalement agitée, visitée par l’incertitude quant à la perpétuation des cycles. Hymne à la lumière, à la révélation de l’impalpable, les créations d’Eric Fourez retiennent ce qui fuit, recueillent les différences imperceptibles qui fourmillent dans les dépôts du visible. À l’affût du presque invisible, dans une remarquable esthétique de la sobriété, de la retenue, elles prolongent l’écriture du vent et de l’eau sur le sable, la graphie obstinée des vagues.
Éric Fourez
La lumière impalpable de l’infinitude
Galerie Faider
12, rue Faider
1060 Bruxelles
Jusqu’au 18 mars 2023
Du mercredi au samedi de 14h à 18h
www.galeriefaider.be
Journaliste
Véronique Bergen est philosophe, romancière et poète. Docteure en Philosophie de l’Université de Paris 8, auteure d’essais philosophiques, dans le champ de l’esthétique, de romans, de recueils de poèmes, de nombreuses monographies sur des plasticiens. Membre de l’Académie royale de langue et de littérature françaises de Belgique, elle collabore à diverses revues, notamment des revues d’art.
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