A la Galerie La Forest Divonne se déploient les œuvres de trois artistes de la matière : Bernadette Chéné, Rachel Labastie et Christian Renonciat. L'exposition, fermée actuellement, est prolongée jusqu'au 16 janvier. Et visible en ligne ici : https://www.galerielaforestdivonne.com/fr/expo/la-matiere-des-choses/
Nous notons depuis quelques années une forte tendance des artistes à revenir à un travail direct de la matière. Artistes émergents qui travaillent la céramique, artistes installés qui reviennent à la peinture (Sterling Ruby, par exemple)... Nombreux sont ceux qui n'ont jamais arrêté cette création qui exige un savoir-faire pointu qui, encore il y a peu, semblait vieux jeu ou obsolète. Retour aux sources du fait main, que diable ! N'est-ce pas ce dont nous avons tous besoin aujourd'hui, en cette période incongrue, et que les artistes auraient supputé avant nous ? Terre, papier, bois, pierre, pâte de la peinture sous les doigts, ressentir chaque texture, chaque vibration, chaque densité. C'est ce que nous offrent, avec générosité et sensualité, trois artistes à la Galerie La Forest Divonne.
Voici dès l'entrée les sculptures de Bernadette Chéné, qui utilise depuis longtemps le papier journal pour ses créations : le quotidien, comme on dit, de tous les jours, exemplaires empilés (une semaine, un mois... de publications) ou roulés, pliés, pour devenir petites sculptures de table, grands totems. Magie de la transformation par le geste simple et minime : le papier vibre encore de tous les textes qui y sont imprimés, mais redevient presque bois, dans ces assemblages denses. Née en 1947, Bernadette Chéné développe depuis les années 1980 une œuvre qui se situe au croisement de l’arte povera et du minimalisme.
Plus loin, découverte de Christian Renonciat, qui se joue de notre mémoire des matériaux et propose avec délectation des trompe-l'œil sculptés dans le bois. Ici, particulièrement, il faut remarquer la belle main de l'artiste, qui transforme un bloc de bois en couverture pliée, aux bords satinés. Et là, une grand plaque de bois en papier déplié et légèrement froissé. Ou bien cette pièce qui semble un matelas en mousse, matière molle, texture impeccable, on y poserait bien la tête. Mais il s'agit encore de bois sculpté. L'artiste offre à notre regard, comme il l’écrit, « la bibliothèque prodigieuse des sensations en mémoire ». Né à Paris en 1947, Christian Renonciat poursuit des études de philosophie à la Sorbonne. A partir de 1969, il apprend les métiers du bois, qui deviendront le cœur de sa pratique artistique.
Troisième artiste, Rachel Labastie, dont nous avions découvert le travail chez Eleven Steens. Depuis sa sortie de l’Ecole des Beaux-Arts de Lyon, en 2003, Labastie (née en 1978) construit une œuvre diverse convoquant aussi bien la performance que la terre, le verre, le feu ou l’osier. Elle a mis au point une argile qui ne sèche jamais, éternellement malléable, sensuelle et offerte à notre besoin de toucher. Cette argile, c'est la terre matricielle et nourricière, d’où tout sort et où tout revient. Dans des caisses démontables, textures créées en marchant pieds nus, fentes et blessures, l'argile semble vivre, frémir. L'œuvre se referme pour être transportée, comme ce retable : triptyque composé d'une pièce centrale et de deux portes. C'est la plus jeune des trois artistes présentés et ça se sent. Labastie cherche encore à ancrer dans son travail une densité et une profondeur qui viennent spontanément aux deux autres. Ça viendra. La recherche est déjà riche.
La matière des choses
Galerie La Forest Divonne
rue Hôtel des Monnaies, 66
1060 Bruxelles
Jusqu'au 16 janvier 2021
Du mardi au samedi de 11h à 19h
www.galerieforestdivonne.com
Fondatrice
Voir et regarder l’art. Puis transformer en mots cette expérience première, qui est comme une respiration. « L’écriture permet de transmuter ce que l’œil a vu. Ce processus me fascine. » Philosophe et sculptrice de formation, elle a été journaliste entre autres pour L’Echo, Marianne Belgique et M Belgique. Elle revendique de pouvoir écrire dans un style à la fois accessible et subjectif. La critique est permise ! Elle écrit sur l’art, la politique culturelle, l’évolution des musées et sur la manière de montrer l’art. Elle est aussi artiste. Elle a fondé le magazine Mu in the City en 2014.
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