Dans sa première exposition chez Sorry We're Closed, Kristof Santy propose une série de toiles qui offrent une vision idéalisée d'objets du quotidien transfigurés dans des portraits ou natures mortes vibrants de couleurs. Jusqu'au 20 mai.
Laisser les objets parler. Tout au long d'une vie, on s'entoure d'objets. Certains ne font que passer, d'autres restent dans un placard ou au fond de la mémoire. Quand on les regarde, quand on les touche, des souvenirs ou des émotions reviennent. Ce sont les objets qui organisent le quotidien et ses rituels. Dans les peintures de Kristof Santy, il y a plein d'objets. Comme des personnages qui posent de manière frontale. Comme des natures mortes témoignant de nos vanités de consommateurs.
Né et vivant à Roulers, Kristof Santy a exposé pour la première fois en 2020. Jusque-là, il avait développé et maîtrisé son art singulier dans le secret de son atelier et à portée de main de sa vaste bibliothèque où il puise ses références picturales, aussi bien dans l'histoire de l'art, que dans les manuels techniques ou les livres de cuisine des années 1960 et 70. Il y a dans les sujets choisis par le peintre, un côté vintage. Ce n'est pas de la nostalgie mais plutôt une mise à distance qui lui permet d'en faire un objet de peinture avant toute chose. Il y a aussi de l'émerveillement devant les formes que le peintre traduit dans une symphonie de reflets et de matières, les nœuds du bois, le bombé du plastique, les reflets du métal. Kristof Santy n'en est pas pour autant un hyperréaliste. On sent dans son coup de pinceau une jubilation dans la peinture et dans l'affirmation de son pouvoir d'évocation.
Si on veut absolument trouver des références, on les cherchera plutôt du côté du pop art, ou plus particulièrement chez deux artistes qui lui ont été associés à la marge comme Domenico Gnoli ou Konrad Klapheck. Dans ses compositions plus élaborées, grand format, comme sa Kaasplank (planche à fromage) ou son Nachttrein (train de nuit), il y a comme un petite musique surréaliste en sourdine quand il ramène sur les deux dimensions de sa toile des éléments qu'il juxtapose pour remplir le cadre de manière presque claustrophobique. La matière elle-même est pleine de repentis, ce qui lui donne encore plus de profondeur, et les quelques toiles plus récentes petit format indiquent que le peintre a envie de donner encore davantage de grain et de matière à sa peinture. Si la présence humaine est rare dans ses toiles, il n'hésite pas à y convoquer des animaux comme des mouches ou des oiseaux, sa peinture étant une entreprise de nomenclature et d'ordonnance du monde, et de réorganisation de ses merveilles quotidiennes.
Un peu comme un exercice de style, il propose aussi une série de portraits d'objets au crayon de couleur qu'il appelle ses « cours de dessin ». Comme Georges Perec se souvient, il dessine une roue de chariot, un rasoir, une lampe de chevet, une coccinelle ou une demi-pomme, un rendu lisse et velouté à déguster pleine feuille.
Kristof Santy
Playtime
Sorry We're Closed
39 rue des Minimes
1000 Bruxelles
Jusqu’au 20 mai
Du mercredi au samedi de 14h à 18h
www.sorrywereclosed.com
Rédacteur en chef
Il n’imagine pas un monde sans art. Comment sinon refléter et traduire la beauté, la douceur, la sauvagerie et l’absurdité des mondes d’hier et d’aujourd’hui ? Écrire sur l’art est pour lui un plaisir autant qu’une nécessité. Journaliste indépendant, passionné et curieux de toutes les métamorphoses artistiques, il collabore également à Bruzz et COLLECT
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