Rotterdam : son port, ses bateaux, ses gratte-ciel... Une image de carte postale. Vraiment ? Totalement détruite au cours de la seconde guerre mondiale, la ville est rebâtie de toute pièce selon le modèle à damiers new-yorkais. Si cette reconstruction tardive donne parfois à la cité un caractère artificiel, certains bâtiments, notamment la gare de Rotterdam Central, valent le déplacement à eux seuls. C'est dans cette même veine que s'offre le musée Boijmans Van Beuningen, joyau artistique inestimable d'une ville en constante évolution.
En Juin 1847, Franz Jacob Otto Boijmans, mourant, décide de léguer son immense collection artistique à la ville de Rotterdam. Le musée Boijmans ouvre ses portes le 3 juillet 1849. En 1864, un incendie détruit une grande partie de la collection. En 1935, le directeur du musée Dirk Hannema décide d'offrir un nouveau souffle à ces œuvres d'exception. Il charge alors Ad Van der Steur de construire un nouveau bâtiment, qui s'installe rapidement dans la Plaine des Musées. En 1958, l'immense collection est encore agrandie par le don de Daniël George Van Beuningen, ajoutant par la même occasion sa particule au musée. Fini le Boijmans, la postérité retiendra désormais le nom Boijmans Van Beuningen, conclusion irréversible d'un siècle de philanthropie artistique. Pérennisée, la collection s'étoffe encore de nos jours grâce aux dons, publics ou anonymes...
Voici pour l'histoire, place à l'art
Si la façade extérieure du Boijmans Van Beuningen ne paye pas de mine, un porche d'église invite le promeneur à s'abriter dans le confortable hall d'entrée. S'ouvre alors un bâtiment intemporel, contrastant avec la modernité relative de la ville. Divisé en 2 ailes, le musée abrite, en plus de sa collection permanente, des expositions temporaires (de qualité variable, il faut bien l'avouer...). Pour deux-trois euros de plus, le visiteur ne prend cependant pas un risque énorme et voit offrir à son séjour une perspective inattendue.
Sans vouloir abuser d'expressions anglophones pompeuses, le musée est un
must-see. Pour s'en rendre compte, il suffit de constater l'énorme catalogue des artistes exposés : Breughel, Rubens, Rembrandt, Degas, Monet, Dali, Picasso, Van Gogh... auxquels viennent s'ajouter Kandinski, Cézanne, Magritte et autre Rothko, excusez du peu ! De ce point de vue-là, aucun doute : le Boijmans vous permettra de rayer mentalement quelques noms dans votre liste d'incontournables à avoir vu avant trépas. Derrière cette avalanche de noms, son impressionnante collection offre aussi un regard inégalé sur l'évolution de la peinture batave à travers les âges. En effet, présentées par ordre chronologique, les œuvres à voir ici vous apprendront énormément sur l'énorme qualité de l'art pictural des Pays-Bas. Ne soyez pas pressés, le musée ne se dévoile qu'à ceux qui prennent la peine de s'y attarder. Une visite en triple vitesse ne vous apportera rien d'autre qu'un immense flou artistique. Asseyez-vous, flânez, la visite n'en sera que meilleure.
Les salles se succèdent comme autant d'ouvertures sur les influences et styles de leurs auteurs. L'ensemble jouit d'une cohérence certaine et offre un très bon panorama des évolutions et polémiques ayant émaillé la production artistique du moyen-âge à nos jours. La visite de la collection permanente vous laissera une impression contrastée. Si vous vous égosillerez sur le niveau de détails de
La petite tour de Babel de Brueghel l'Ancien, ou l'incroyable vision de Claude Monet, certaines œuvres anonymes auront le don de vous transporter bien plus que certaines têtes d'affiche. De quoi faire réfléchir également à la place de ces
seconds couteaux, oubliés de la grande Histoire de l'art. Car si les grands artistes marquent invariablement leur époque, les bonnes peintures sont elles, intemporelles.
Musée Boijmans Van Beuningen
Rotterdam
http://www.boijmans.nl/