La 55e édition des Fêtes de la Saint-Martin à Tourinnes-la-Grosse ont ouvert leurs portes samedi 6 novembre. Installées depuis si longtemps dans le paysage culturel wallon, ces fêtes proposent un parcours officiel d'art contemporain toujours qualitatif ainsi qu'un parcours d'artistes dans plus de 90 lieux autour de Tourinnes.
Créées en 1965 par Max van der Linden, céramiste de renommée internationale disparu en 1999, les Fêtes de la Saint-Martin se déroulent en novembre à Tourinnes-la-Grosse et environs. Elles accueillent chaque année de 25 à 30 000 visiteurs, venant de Bruxelles et du Brabant wallon (45%), de toute la Wallonie (20%), de Flandre (35%) et même de l’étranger.
Initialement prévu pour 2020, le programme des Fêtes a dû être reporté à novembre 2021. Le parcours officiel d'art contemporain est porté cette année par le commissariat du duo d'artistes Véronique Poppe et Christian Rolet. Ceux-ci exposent aussi pour le moment à la Galerie Marie-Ange Boucher.
"Le dessin s’est imposé à nous comme une évidence, expliquent-ils. À l’essence de ses origines, le dessin pose d’emblée la question de sa fragilité en écho à celle de l’humain perpétuellement exposé à des menaces aux contours variés. En 2021, le choix - le dessin - se justifie plus que jamais comme une option idoine : le dessin comme représentation d’un monde fragilisé par l’infiniment petit, à dépasser ; le dessin comme une mise en abyme de son caractère éphémère, à oser ; le dessin comme une réponse spontanée à la déshumanisation, à tenter ; le dessin sous toutes ses formes comme des territoires éminemment humains à explorer où faire œuvre humaine et humanisante en donnant forme au désordre."
Treize artistes, français, belges, saint-marinais, jeunes et confirmés, pluridisciplinaires, ayant choisi le dessin comme technique, ont répondu positivement, dès 2020, à la proposition de créer sur tous types de supports et d’accepter le caractère évanescent de leur apport dans des lieux d’exposition incompatibles avec les conditions de conservation normalement requises pour le dessin.
Partages, territoires de l'humain, le titre du parcours, est né, en lien avec le millénaire de l'église Saint-Martin, de l'idée du partage du manteau et de la figure tutélaire de saint Martin, incarnation d’une force fragile et symbole magistral du partage.
Commencez la visite à la Ferme du Rond-Chêne, qui accueille traditionnellement dans plusieurs de ses bâtiments les expositions du parcours. Dans la laiterie, un piano mécanique carbonisé vous accueille avec une petite musique mélancolique. C'est Ecoutez d'où vient ma peine, de Darwin Chapelier. Il déploie aussi une bouleversante série de photos brûlées, présentant un petit garçon (lui-même ?). Dans la grange, installation intense et émouvante de Fabesko, artiste autodidacte. Suspendues à la charpente des broderies sur textile, et, derrière une cloison, une chambre pleine de trésors, petits dessins, doudous étranges et inquiétants.
Véronique Poppe et Christian Rolet ont installé leurs dessins dans la porcherie, enveloppés de la mélodie d'une chorale. Les artistes ont en effet choisi de se concentrer sur le chant comme fil conducteur pour ce parcours. Lors du confinement dû à la crise sanitaire, plusieurs chorales en ligne ont vu le jour, où des personnes chantaient ensemble via écran. Il apparaît alors clairement aux deux artistes que le chant est à la fois un moment de partage et un mode d’expression extrêmement basique, humain, honnête et pur qui est utilisé autant seul qu’en groupe, autant dans les moments de joie que de douleur. Toutes ces émotions traversent les dessins accrochés aux murs ou posés sur la vitre d'une fenêtre, comme un vitrail, comme dans un lieu sacré.
La thématique du partage et du dessin a naturellement réuni Élodie Moreau et Raphaël Decoster autour de la maquette d’une maison, celle des parents d’Élodie, celle des grands-parents de Raphaël. Qu'est-ce qu'une maison ? Une cosse protectrice ? Un antre pour se protéger du monde extérieur, le contenant d'une famille ? Qu'est-ce que cet objet agrège comme émotions ? Les impressions lithographiques servent de base à Elodie Moreau pour une série très graphique dans une palette de violets denses. Raphaël Decoster utilise la maison comme objet et motif pour de grands dessins à la mine de plomb : elle se couvre de poils, ou se noie dans une mer déchaînée.
On y voit aussi Luc Lamy, Priscilla Beccari, Pierre-Amir Sassone, Willy Petit Pain, Denis Glinne, Nathalie Van de Walle, Fanny Alet. Les 13 artistes exposent ensemble dans la spectaculaire grande de la Ferme de Wahange : on sillonne parmi les œuvres, on se laisse happer par l'une ou l'autre pièce.
Sans oublier bien sûr le parcours dans les lieux privés, toujours un moment privilégié pour rencontrer artistes et artisans. C'est à voir jusqu'au 28 novembre.
Fêtes de la Saint-Martin
Tourinnes-la-Grosse et environs
Jusqu'au 28 novembre
Les samedis et dimanches
Badge d'accès disponible dans 6 lieux d'accueil
www.tourinnes.be
Fondatrice
Voir et regarder l’art. Puis transformer en mots cette expérience première, qui est comme une respiration. « L’écriture permet de transmuter ce que l’œil a vu. Ce processus me fascine. » Philosophe et sculptrice de formation, elle a été journaliste entre autres pour L’Echo, Marianne Belgique et M Belgique. Elle revendique de pouvoir écrire dans un style à la fois accessible et subjectif. La critique est permise ! Elle écrit sur l’art, la politique culturelle, l’évolution des musées et sur la manière de montrer l’art. Elle est aussi artiste. Elle a fondé le magazine Mu in the City en 2014.
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