En prenant en main le
Groupe des XX à partir de 1883, Maus servit d’abord ses amis, puis s’arc-bouta sur eux pour séduire et approcher les créateurs français les plus novateurs du moment. Ceux-ci commençaient à percer en France et étaient à la recherche de débouchés dans les pays voisins. Les artistes belges y gagnèrent, au début, un public enfin prêt à regarder leurs œuvres, aux côtés d’autres venues de France, d’Angleterre ou d’Allemagne, auréolées au moins du prestige lié à ces grandes nations. Maus développa alors sa vision d’un mouvement général novateur. Ce louable internationalisme, qui était aussi celui de
Stefan Zweig au même moment, s’explique également comme une réaction idéologique à la montée des nationalismes dont on sait à quel désastre ils allaient finalement conduire l’Europe. Mais les Vogels et Ensor se retrouvèrent alors aux côtés d’écoliers appliqués de l’impressionnisme, et en particulier de l’impressionnisme français. Leur originalité et leurs propres orientations plastiques se trouvèrent noyées dans un mouvement général confus dont le ton semblait de nouveau venir d’un pays voisin. Et, à l’académisme qu’ils avaient si vivement combattu, succédait un autre conformisme et d’autres barbons disposés à leur dicter la voie de leur création. Maus, en revanche, trouva dans ce développement de son rôle sur le plan international une façon d’amplifier son action, son pouvoir, et son volume d’affaires comme agent. Le sentiment de trahison que ressentirent ses amis, proches compagnons du début, se comprend. Il a laissé des traces chez les artistes et, surtout, l’histoire de l’art depuis lors s’est malheureusement écrite et en partie passée à la remorque de l’art français.Il est vrai que si Maus s’était limité à mettre en valeur les artistes belges, il n’aurait pu faire de son action un métier à temps plein, ni abandonner le barreau. Mais, peut-être, la spécificité de la création artistique en Belgique y aurait-elle davantage gagné.
Ses écrits le prouvent, Octave Maus avait parfaitement saisi la problématique théorique et formelle qui sous-tendait depuis l’impressionnisme, l’aventure de l’Art moderne. Mais, chez
Vogels, chez
Ensor, chez
Evenepoel ou
Rik Wouters et
Spilliaert, le sujet ne recule jamais devant la forme et celle-ci au contraire le sert. Sous son pouvoir, le sujet se transforme, il s’approfondit, se densifie, creuse le sens et débouche sur la contemplation, il explore la sensation, devient recherche du bonheur, suspension du temps, rêverie, nostalgie, fantasme ou cauchemar, cri ou même revendication. La problématique de la forme en soi, le jeu théorique qui a débuté avec l’impressionnisme, qui s’amplifie avec le post-impressionnisme et les Nabis, qui engendre le fauvisme, et qui débouchera sur le sujet prétexte et sur le cubisme, tout ce mouvement qui ira vers l’art abstrait ou l’art non figuratif, a-t-il jamais intéressé les grands créateurs belges ? Leur génie était ailleurs.
Vous verrez une quarantaine d'œuvres de Louis Artan, Jos Albert, Anna Boch, Frantz Charlet, Émile Claus, Henri de Braekeleer, Anna de Weert, Roger-Maximilien Dubois, Henri Evenepoel, James Ensor, Adrien-Joseph Heymans, Marcel Jefferys, Lucien Frank, Georges Lemmen, Albert Marquet, Xavier Mellery, Jenny Montigny, George Morren, Périclès Pantazis, Émile Sacré, Alfred Sisley, Théo Van Rysselberghe, Guillaume Van Strydonck, Eugène Verdyen, Guillaume Vogels, Rik Wouters appartenant à des collectionneurs privés.
Les XX et la Libre Esthétique
Impressionisme - Luminisme - Fauvisme
Association du Patrimoine Artistique
7 rue Charles Hanssen
1000 Bruxelles
Jusqu'au 31 mars
Du jeudi au samedi de 14h à 18h
hwww.associationdupatrimoineartistique.be