L’hôtel van Eetvelde, laboratoire de l'Art nouveau

Eric Valenne
30 mai 2023

Dans le cadre de l’année Art nouveau 2023, l’hôtel van Eetvelde est à nouveau ouvert au grand public. Avec désormais, dans la maison voisine, le LAB·AN, un espace de promotion dédié à ce courant majeur.


Après une superbe rénovation de sa coupole (laquelle aura duré plus de cinq mois d’un travail intense et fragile), cette perle bruxelloise de l’Art nouveau située au numéro 4 de l’avenue Palmerston, dans le quartier des Squares, vient de rouvrir ses portes au public à la mi-mai.

Déjà de l’extérieur, cet édifice est célèbre pour sa façade-rideau très originale et avant-gardiste, avec sa couverture de volets qui lui donne les apparences d’une armoire cachant de somptueux secrets à percer. Conçu en 1895 par l'architecte Victor Horta (1861-1947), l’hôtel van Eetvelde fut commandé à l'architecte par le diplomate et homme d’affaires Edmond van Eetvelde (1853-1923) et est, depuis l’année 2000, classé Patrimoine mondial de l’Unesco.

Du haut de son poste de secrétaire général de l'État indépendant du Congo, ce baron proche du roi Léopold II a démontré sa réussite sociale avec cette habitation familiale où il accueillait hommes d’affaires, diplomates de haut vol et le Tout-Bruxelles lors de réceptions fastueuses. Selon les dires de Victor Horta, l'hôtel fut conçu comme « le plus audacieux qu’il ait fait jusque-là ». L’édifice, qui se devait également de représenter la personnalité de son commanditaire, n'a pas échappé à la règle, à l'instar des autres bâtiments Art nouveau, comme le voulait l’architecte lors de ses créations. Et ce, de l’ensemble immobilier jusqu’à la décoration dans ses moindres détails, à admirer absolument.


Espace de travail

L’hôtel van Eetvelde figure parmi les quatre habitations majeures de l'Art nouveau reconnues au Patrimoine mondial de l’UNESCO avec l’hôtel Tassel (1893), l’hôtel Solvay (1894) et la maison Horta ainsi que son atelier (1898). La superbe verrière centrale en rotonde, qui avait subi l’outrage des ans depuis 125 ans (fumées de tabac, humidité, rouille et poussière), a été magnifiquement rénovée par l’atelier gantois Mestdagh sous la direction de Katrien Mestdagh, maître-verrière.

Agrémenté comme il se doit d’éléments végétaux finement ciselés jusque dans le plus petit détail, ce puits de lumière surplombe de sa magnificence un escalier central ainsi que ce qui devrait être un jardin d’hiver. La lumière est distillée d'en haut vers tous les espaces. Il ne manque plus que les palmiers et autres fougères arborescentes pour donner davantage de vie à ce lieu...

Il y a également le salon et la salle à manger. Le premier est garni de lambris en plaques d'onyx vert avec incrustations en bronze doré et parquet en chêne. Il est relié au jardin d'hiver par une magnifique porte de verre coloré et biseauté. Quant à la salle à manger, elle est décorée d'arbustes avec également une tapisserie mettant en scène plantes et animaux exotiques. Question peut-être de rappeler que le fabuleux et richissime Congo aurait distillé doucement son influence sur l'Art nouveau... 

La visite permet également de découvrir l’espace de travail du baron, sis au numéro 2 de la rue Palmerston (maison à côté à l’angle de la rue). Construit en 1899 pour accueillir le bureau et la bibliothèque du diplomate, l’édifice a gardé son mobilier d'origine en boiserie africaine et acajou, padouk et loupe d’érable. Comme ce manteau de cheminée agrémenté de marbre rose et de bronzes dorés du plus bel effet. Bien que séparés plus tard et ayant appartenu à divers propriétaires, les deux bâtiments contigus sont désormais accessibles en une seule visite via les deux entrées. Une mini-exposition y remet également en perspective la colonisation belge du Congo ainsi que l'exploitation de ses immenses ressources, de quoi témoigner et alimenter le débat en toute transparence.


Promotion de l'Art nouveau

C'est également au numéro 2 qu'est présentée une nouvelle initiative  : le Laboratoire Art nouveau (LAB·AN). Dans cette maison acquise par la Région de Bruxelles-Capitale, le LAB·AN est dédié à l’interprétation et à la promotion de l’Art nouveau en Belgique (et dans le monde) à travers plusieurs projets culturels (conférences, expos, ateliers…). Quand on pense que cet art était quasi méprisé jusque dans les années 1970. Et enfin rétabli à sa juste valeur depuis lors...

Cette ouverture de l’hôtel van Eetvelde est due à l’initiative du secrétaire d’Etat bruxellois en charge du Patrimoine Pascal Smet, avec le soutien de la ministre fédérale Karine Lalieux en charge de Beliris, ainsi que du ministre-président Rudi Vervoort et du ministre bruxellois pour l’Image de Bruxelles Sven Gatz. L’événement est organisé conjointement par urban.brussels et visit.brussels sous le commissariat de Paul Dujardin.       
 

Hôtel van Eetvelde
LAB-AN
2 et 4 avenue Palmerston
1000 Bruxelles
Samedi, dimanche et lundi et jours fériés de 10h à 18h
Inscription et réservation
www.visit.brussels

 

Eric Valenne

Journaliste

Reporter et photographe pour de nombreux magazines et éditeurs, spécialisé dans le tourisme depuis plus de trente ans et après plus de mille voyages, Eric Valenne a plusieurs cordes à son arc...-en-ciel : la nature, l’architecture et l’art. Tous les arts, en fait. Quand je vois une œuvre d’art qui me plaît, quelle qu’elle soit, je sens vibrer en moi une bonne énergie qui m’inspire et réveille ma créativité. Et si elle ne me plaît pas, c’est que je ne l’ai pas comprise. L’art nous donne une direction, un cap. Vers quoi, aucune idée. Mais c’est comme une boussole qui nous mène à travers la vie.