Le peintre colombie - et bruxellois d'adoption - expose son énigmatique théâtre de la solitude à la Galerie Michèle Schoonjans. Jusqu'au 1er juillet.
C'est un appartement vide habité par la peinture. Les portes sont ouvertes et les fenêtres souvent fermées. Les drapés des tentures évoquent une scène d'un théâtre de l'absurde avec comme personnages un peintre, son modèle et quelques accessoires que sont le chevalet, la palette, des cadres vides ou une chaise tabouret aux jambes filiformes. C'est un appartement où le silence est épais, dans lequel la lumière découpe des tranches d'ombre comme des parts de gâteau.
Il y a la présence de ce paysage de montagne, mis en abyme dans les toiles ou mis à l'écart, et inaccessible, derrière l'encadrement des fenêtres. C'est un paysage intérieur, un paradis perdu qui n'existe que par la révélation de la peinture. Et quand le peintre approche son pinceau de la toile, c'est pour éclairer le paysage comme avec une lampe torche qui troue la nuit. Le dimanche, le peintre s'invite à l'extérieur pour capter un paysage, qui se dérobe telle une mélodie qui trotte en tête, et qu'on n'arrive plus à identifier. Et la toile reste blanche.
Né à Bogota, Luis Guzman y a étudié aux Beaux-Arts, avant de suivre un master à Madrid, et ensuite à La Cambre. Il réside à Bruxelles depuis 2012. Sa peinture est nimbée de mystères et d'une solitude mélancolique. On est dans un monde de l'illusion et du paradoxe comme dans une nouvelle de Borges. Chacune de ses toiles saisit un moment figé dans l'éternité de l'instant. Le spectateur est plongé dans une escape room, dont il ne s'échappe jamais tout à fait. La palette et les compostions de Luis Guzman empruntent à la peinture classique et on peut aussi y voir des références à Magritte, à Delvaux, aux jeux d'ombre à la Hopper, ou encore une amusante déclinaison du Déjeuner sur l'herbe de Manet. Le peintre manie les couleurs avec subtilité, en faisant surgir un jaune vif, un rouge flamboyant dans le tissu d'un vêtement ou un vert électrique dans un tableau de paysage. Brouillant les frontières entre le réel et l'imaginaire, Luis Guzman nous invite à ouvrir portes et fenêtres. Et découvrir un ailleurs qui n'est jamais très loin.
Luis Guzman
Another Place
Michèle Schoonjans Gallery
Rivoli Building
Chaussée de Waterloo 690/25
1180 Bruxelles
Jusqu'au 1er juillet
Du jeudi au samedi de 11h à 18h
www.micheleschoonjansgallery.be
Rédacteur en chef
Il n’imagine pas un monde sans art. Comment sinon refléter et traduire la beauté, la douceur, la sauvagerie et l’absurdité des mondes d’hier et d’aujourd’hui ? Écrire sur l’art est pour lui un plaisir autant qu’une nécessité. Journaliste indépendant, passionné et curieux de toutes les métamorphoses artistiques, il collabore également à Bruzz et COLLECT
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