Maurice Pasternak, entre absence et résidu

Manon Paulus
13 février 2020

Pourquoi se contenter d’une seule exposition des travaux récents de Maurice Pasternak quand on peut en monter deux ? Sans cris ni traces, second volet de la double exposition consacrée à l’artiste au Salon d’Art est visible jusqu’au 29 février.

Maurice Pasternak (1946, vit et travaille à Bruxelles), éminent graveur (notamment à la manière noire) et ancien professeur à La Cambre, nous dévoile une série de ses récents dessins et cires pigmentées. La trace profonde de l’Homme sur son environnement et paradoxalement la suggestion de Son inévitable disparition, semblent ici animer l’artiste. Sont exposées des images sensibles, délicates, comme voilées, qui paraissent naître de l’obscurité ou au contraire - on ne sait le dire - disparaître petit à petit dans le néant.

Dans cette exposition, la figure de l’Homme marque par son absence : espaces sauvages ou domestiqués, vides ou seulement habités par des fantômes ; représentations animales ou végétales. On pourrait y voir une volonté de l’artiste de sortir d’un regard anthropocentriste, volonté plus que nécessaire à notre époque. Et pourtant il n’en n’est rien, l’Homme reste au centre du propos. Car à côté de l’aspect très esthétique de ces images, Pasternak développe un discours tragique sur l’humanité. Ce que l’Homme fait de pire : guerre, destruction, pulsion de domination. Il brosse un portrait bien peu optimiste et flatteur de notre espèce, et d’ailleurs qui pourrait le lui reprocher ?

« Flux des groupes humains. Appropriation des vies.
Témoin impuissant des mouvances prédatrices, l’histoire ne retient que les « remplacements » par le sang.
Communautés « élues » – droits au sol. Droit du sol.
L’Autre reste l’inquiétant, la menace. 
» (Extrait du texte de l’exposition : Maurice Pasternak, novembre 2019)

Et pourtant, est-ce bien ce genre de discours qu’il est primordial de produire en ces temps déjà troublés par un catastrophisme ambiant ? Car ici, rien, à part le noir, ne semble émerger des flots.

Maurice Pasternak
Le Salon d'Art
81 rue de l’Hôtel des Monnaies
1060 Bruxelles
Jusqu'au 29 février
Du mardi au vendredi de 14h à 18h30
Samedi de 9h30 à 12h et de 14h à 18h
http://www.lesalondart.be/

Manon Paulus

Journaliste

Formée à l’anthropologie à l’Université libre de Bruxelles, elle s’intéresse à l’humain. L’aborder via l’art alimente sa propre compréhension. Elle aime particulièrement écrire sur les convergences que ces deux disciplines peuvent entretenir.