Elle a posé ses valises et sa famille à Bruxelles, chaussée de Louvain, dans une ancienne cartonnerie remodelée par l’architecte belge Bruno Erpicum. C'est ici qu'elle a créé NooN ConsultinG Art. Issue du monde des affaires, Désirée Meza-Mesia s’est plongée il y a un an et demi dans l’univers de l’art. Par passion, par conviction aussi. Car cette jeune Madrilène est convaincue que l’art a un rôle à jouer dans notre société. Et en cette année particulière plus que jamais.
Le lieu tout d'abord : l'architecture est totalement épurée sans pour autant être strictement fonctionnelle. Lumière et texture sont les éléments essentiels d'un espace réparti sur plusieurs étages. L'architecte a conféré à ce loft une certaine atmosphère et une vie particulière ponctuée de patios et de fenêtres à des endroits improbables : à chaque fois, des solutions variées pour apporter de la clarté à l'intérieur. A côté de vastes volumes, il subsiste toujours un espace pour rêver ou s’isoler. Ainsi l’aspect brut et en même temps feutré et intime du sous-sol au caractère pourtant industriel permet à la galeriste de concevoir des project rooms ou bien de présenter une facette ou une étape bien particulière du parcours d’un artiste exposé, tout en proposant une circulation fluide d’un niveau à un autre et des accrochages peu communs.
Quant au concept, NooN ConsultinG Art se veut avant tout un lieu de rencontre, d'échanges intellectuels et de réflexion sur l'art et la société. C'est pourquoi Désirée Meza-Mesia entend marier expositions, installations, conversations et débats ou bien dialogues entre deux ou trois artistes. L'espace est également ouvert aux collectionneurs et aux institutions ainsi qu'aux projets curatoriaux. La galerie vient par ailleurs de s’associer un service juridique et de conseil en art et déploie un riche agenda de rencontres et de conférences. Notons le tout récent colloque sur la notion d’espace et d’adéquation à nos besoins qui réunissait la philosophe Ann Van Sevenant, le galeriste et collectionneur spécialisé dans l'Art aborigène Bertrand Estrangin et l'architecte-artiste Ola-Dele Kuku, à qui la galeriste a donné carte blanche pour son exposition Icons of Domestic Rituals.
Formé à l'institut d’Architecture de Caroline du Sud (USA) puis en Italie, Ola-Dele Kuku montre une belle rétrospective d’un travail conceptuel à multiples facettes, extrêmement dense, qui se déploie en dessins, installations, collages et objets-sculptures. Ola-Dele se penche sur les notions de structure, d’identité et d’éducation à travers l’art. Il aborde l'architecture dans sa dimension critique, interrogeant tant nos manières d'exister que nos modes de pensée et de vie. L'exposition elle-même est comme une traversée. Notons, entre autres, Opéra Doméstica 2, présentée lors de la Biennale d’Architecture de Venise 2016 alors qu’il représentait son pays d’origine, le Nigéria. Au sous-sol, l’œuvre conceptuelle Agenda setting 10 retient l’attention. Composée d’un grand panneau où sont cloués des livres ouverts, elle a été réalisée sur place pour la galerie juste après le confinement. Derrière cette belle composition de pages politiques, religieuses, littéraires ou philosophiques, toutes soigneusement choisies, un grand questionnement : qu’advient-il de nos valeurs, quelle sera l'issue des bouleversements dont nous sommes témoins ?
A ses côtés, Casimir de Dalmau, peintre autodidacte de Barcelone, invité à dialoguer avec le travail d’Ola-Dele, partage sa vocation artistique. Aux cimaises, des réalisations sur papier montrées à Barcelone lors de son exposition Tattoos under skin couvrant les années 2011 à 2019 de son travail. Il est aussi question d’espace, ici, mais d’un espace mental et émotionnel, de réflexion sur la notion d’art et la responsabilité de l’artiste. L’œuvre ne peut-elle être considérée une œuvre d’art qu’à partir du moment où un dialogue s’établit avec un spectateur et qu’elle suscite une réaction de sa part, une reconnaissance ? Nous sommes en présence d’une peinture personnelle et intimiste où le peintre dévoile ce qui l'habite, par petites touches, avec simplicité. La main et l'esprit se rejoignent dans les multiples variantes d'un gribouillage récurrent. Pour guider le visiteur, des titres faisant écho à de grands maîtres de la littérature ou de la peinture qui ont ému l'artiste. Ainsi Green night at Giverny pour Claude Monet ou bien Mémoire d'automne pour Antonio Machado.
La qualité du projet, doublée de la chaleur de l'accueil du Sud, devrait plaire tout de suite à ceux qui ne connaissent pas encore NooN ConsultinG Art.
Icônes des rituels domestiques
Ola-Dele Kuku
Tattoos under skin
Casimir de Dalmau
NooN ConsultinG Art
chaussée de Louvain, 803
1140 Bruxelles
Du lundi au samedi, de 10h00 à 18h00 et sur RV.
Jusqu’au 10 novembre
www.noonconsulting.art
Rédactrice
Traductrice puis pédagogue de formation, depuis toujours sensible à ce vaste continent qu’est l’art. Elle poursuit des études de sociologie et d’histoire de l’art avant de relever le défi de dire avec des mots ce que les artistes disent sans mots. Une tâche d’interprète en somme entre deux langages distincts. Partager le frisson artistique et transmettre l’expérience esthétique et cet autre rapport au monde avec clarté au lecteur, c’est une chance. Une sorte de mission dont elle nourrit ses textes.
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