La galerie Aboriginal Signature présente des œuvres des femmes Ömie de Papouasie-Nouvelle-Guinée, peintes sur de l'étoffe d'écorce.
Habitant une région montagneuse reculée dans la province d'Oro, au Nord de la Papouasie-Nouvelle-Guinée, les femmes Ömie ont attendu 2006 avant d’attirer l’attention du monde de l’art, avec leurs peintures sur étoffe d'écorce. Si elles ont vécu longtemps dans l'isolement, elles ont été en contact avec des missionnaires qui les ont, entre autre choses, encouragées à abandonner les tatouages corporels. La peinture s'est alors imposée à elles pour reproduire et conserver tous ces motifs et symboles interdits sur la peau. Chaque femme ne pourra peindre que les sujets sur lesquels elle a autorité, et c'est un savoir qui est transmis de mère en fille. Les 28 œuvres des 19 artistes présentées dans cette exposition, qui est la plus importante consacrée à l'art Ömie en Europe, rassemblent différentes générations nées entre 1919 et 1974. À première vue, les symboles et motifs qui se répètent et se combinent sur la toile sont totalement abstraits. En fait, ces traits et cercles racontent les mythes de la création du monde ou s'inspirent du milieu naturel dans lequel vivent ces femmes, une région tropicale qui est un véritable paradis de la biodiversité. Des montagnes deviennent des zigzags, les troncs d'arbres sont transposés en flèches, c'est comme si ces femmes décryptaient la logique interne de la nature qui les entoure pour en tirer des motifs géométriques abstraits.
Si on prend la peine d'observer ces œuvres, on découvre une grande diversité picturale de la part des différentes artistes de cette communauté. Ainsi, dans Vinöhu'e, Fate Savari reproduit des motifs de tatouage que lui a enseignés sa mère. On y retrouve les cercles que les hommes se tatouaient autour du nombril et d'autres motifs que les femmes se tatouaient sur les joues et autour de la bouche lors de rites d'initiation. Dans Ije Taigu'e de Celestine Warina, divisée en cinq bandes horizontales, apparaissent des motifs inspirés par un tronc d'arbre tordu, les plumes de queue de l'Hémiprocné à moustaches, oiseau sacré des forêts papoues, et les œufs d'un insecte géant. Enfin, dans cette œuvre étonnante de minimalisme que Sarah Ugibari a réalisée à l'âge vénérable de 96 ans, elle s'est aussi inspirée de la queue de ce même oiseau.
« Parfois certains nouveaux clients commencent par me demander si c'est ancien. Même si le tapa est la plus ancienne forme de tissu fabriquée par l'homme, les œuvres présentées ici n'ont jamais plus de quinze ans. Pourquoi l'authenticité ne pourrait-elle s'incarner dans le présent ?, s'interroge le galeriste Bertrand Estrangin. Si ces peintures nous touchent et nous parlent, c'est par leur qualité picturale, mais aussi parce qu'elles sont un vecteur de transmission culturelle entre la tradition et le présent. »
Unseen Secrets of the Mountain Rainforest:
Ömie Women’s Art of Papua New Guineaömie-woman-s-art-aborigiona-signazture- bruxelles
Aboriginal Signature,
101 rue Jules Besme
1081 Bruxelles
jusqu'au 11 février
sur RDV du mardi au samedi de 11h à 19h
www.aboriginalsignature.com
Rédacteur en chef
Il n’imagine pas un monde sans art. Comment sinon refléter et traduire la beauté, la douceur, la sauvagerie et l’absurdité des mondes d’hier et d’aujourd’hui ? Écrire sur l’art est pour lui un plaisir autant qu’une nécessité. Journaliste indépendant, passionné et curieux de toutes les métamorphoses artistiques, il collabore également à Bruzz et COLLECT
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