Dans sa dernière série exposée à la Galerie Templon, Philippe Cognée a fait de son atelier le sujet principal de sa peinture pour, dans le dénuement capter, la beauté.
Quand on est près de la toile, on a la sensation d'être en contact avec une matière vivante tourbillonnante, grattée, hachurée. On jurerait même entendre un grondement sourd. Puis quand on fait quelques pas en arrière, le calme revient, l'espace se vide. Il ne reste plus qu'une chaise renversée, une boite en carton ou un pot hérissé de pinceaux.
Pour beaucoup de peintres, l'atelier est un monde en soi une porte ouverte vers l'extérieur. Dans sa dernière série, réalisée pendant le confinement, Philippe Cognée a fait de son atelier le motif principal. Une atelier réduit à l'essentiel, c'est-à-dire un à espace de taches de peinture fantomatiques sur le plâtre d'un mur, de l'ombre d'un radiateur, d'une pelle filiforme et quelques objets usuels. Une boite entrouverte qui contient un autre monde caché. Le peintre nous avait habitué à des paysages urbains brouillés, des scènes de foule floues. Mais cette fois, les circonstances ont réduit le sujet à l'espace-même, comme pour se rapprocher de encore plus de l'essence de la peinture.
« J'essaie de casser ce que je sais faire pour trouver un geste derrière. Il ne faut jamais dire, j'ai trouvé, mais plutôt je cherche quelque chose, » explique-t-il. Pour cette série, l'artiste n'a pas travaillé par application directe de la peinture mais par projection de gouttelettes par vagues successives, une matière qu'il gratte, qu'il enlève avant de remettre une couche. « Chaque tableau a son histoire. C'est une bataille qui peut prendre trois jours ou trois semaines, parfois plus même. »
Depuis 20 ans, le peintre prépare ses couleurs en mélangeant de la cire d'abeille avec des pigments, ce qui lui donne une densité et une luminosité sourde très particulière. Dans cette série, il a limité sa palette à quelques couleurs, du blanc, du gris, du noir en laissant la lumière dessiner les formes. Pour quelques toiles, il est sorti de son atelier. La couleur est revenue pour évoquer des paysages. En contraste avec le dépouillement de l'atelier, la toile semble avoir du mal à garder le trop plein de feuillages, les déchirures d'un ciel dans le cadre, comme si le monde extérieur était trop grand pour entrer. On approche parfois de l'abstraction, mais quand on trouve la juste distance, on distingue les volumes et le mouvement des feuillages. « Les choses se construisent par elles-mêmes » reconnaît-il. « La magie de la peinture est quelque chose qu'on ne peut pas expliquer par les mots. C'est d'abord une sensation. Je pourrais comparer ça à la cuisine qui prend corps avec le goût qui fond dans la bouche. »
Philippe Cognée
L'oeil du cyclone
Galerie Templon
13 A rue Veydt
1060 Bruxelles
Jusqu'au 23 octobre
Du mardi au samedi de 11h à 18h
www.templon.com
Rédacteur en chef
Il n’imagine pas un monde sans art. Comment sinon refléter et traduire la beauté, la douceur, la sauvagerie et l’absurdité des mondes d’hier et d’aujourd’hui ? Écrire sur l’art est pour lui un plaisir autant qu’une nécessité. Journaliste indépendant, passionné et curieux de toutes les métamorphoses artistiques, il collabore également à Bruzz et COLLECT
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