Pour Kryotoglyphe(s), sa deuxième exposition chez Marc Minjauw, l'artiste français SEIZE a allégé ses compositions de tout superflu pour ne garder que des fragments de réseaux qui peuvent se lire comme les lettres d'un alphabet venu d'ailleurs. Jusqu'au 27 mai.
SEIZE aime faire parler les murs. Des surfaces de béton craquelé et ridé comme des peaux fatiguées se couvrent d'énigmatiques signes qui emportent le regard, faisant jaillir de franches couleurs là où règnent les non-couleurs sans âme. Bien qu'il expose en galerie depuis plusieurs années, l'artiste n'a jamais renoncé à peindre dans la rue, tout comme il n'a jamais abandonné son surnom de Happy wallmaker. Peindre les murs en solitaire, c'est une gymnastique mentale et physique, c'est laisser des signes dans la ville au hasard de ses promenades, c'est offrir aux passants occasionnels (ils ne sont pas légion dans les endroits désolés où il peint) une fenêtre vers un ailleurs que chacun définira comme il l'entend et le voit.
Pour sa deuxième exposition chez Marc Minjauw, désormais installé dans les galeries Louise, près de la place Stéphanie, l'artiste présente des œuvres qui marquent une épure dans son art. Ses compositions autrefois foisonnantes, complexes mais toujours rigoureuses se sont réduites à l'essentiel. Juste une figure filiforme, une couleur, des traits noirs que SEIZE a baptisés Kryptoglyphe(s), comme si chaque dessin était une lettre d'un énigmatique alphabet. Certains y verront des silhouettes de personnages ou d'objets, d'autant plus changeantes que ces dernières toiles n'ont pas de sens d'accrochage privilégié et qu'elles peuvent être lues horizontalement ou verticalement.
Happé par le ruban jaune, bleu, orange ou vert qui trace son chemin sur l'écru de la toile, le regard peut être entraîné dans un sens ou dans un autre. C'est peut-être de son ancien métier de chauffeur de bus à la RATP qu'il a gardé cet attrait pour les réseaux, décomposés en courbes, droites et autres points nodaux dont il ne subsiste, dans ses kryptoglyphes, que l'architecture minimaliste. Un réseau qui, sur ses toiles, n'est jamais complètement fermé par l'épais trait noir qui le borde, comme pour permettre au regard de s'échapper du cadre quand il le souhaite. Pour en dire le moins et le plus possible, les kryptoglyphes se passent de décor. C'est la matière de la toile et rien d'autre qui apparaît. SEIZE a procédé de la sorte à la suggestion du galeriste qui voyait là une manière de se rapprocher de l'impact visuel de ses créations sur le béton brut de la ville.
En ramenant ses formes à une épure, SEIZE évacue toute référence, toute distraction pour nous laisser avec une figure semblable à un mandala dans laquelle l'attention peut circuler. Un vide, qu'il nous tarde de remplir.
SEIZE — Happy wallmaker
Kryptoglyphe(s)
Marc Minjauw Gallery
Place Stephanie 2 / 0
Passage Galerie Louise
1050 Bruxelles
Jusqu'au 27mai
Du mardi au samedi de 10h30 à 13h et de 14h30 à 18h
www.mmgallery.be
Rédacteur en chef
Il n’imagine pas un monde sans art. Comment sinon refléter et traduire la beauté, la douceur, la sauvagerie et l’absurdité des mondes d’hier et d’aujourd’hui ? Écrire sur l’art est pour lui un plaisir autant qu’une nécessité. Journaliste indépendant, passionné et curieux de toutes les métamorphoses artistiques, il collabore également à Bruzz et COLLECT
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