La Fondation blan rêve en couleur

Mylène Mistre-Schaal
18 avril 2023

Nouvelle venue sur la scène artistique bruxelloise, la Fondation blan a ouvert ses portes le 29 mars. Espace de création placé sous le signe de l’audace, elle s’affirme comme un lieu de rencontre et de curiosité. Pour marquer sa naissance, l’artiste Stephan Balleux y présente Artificialia, une exposition carte blanche foisonnante.

Ce matin-là, l’effervescence est palpable au 26, boulevard Général Jacques. C’est sous le bruit des derniers coups de perceuse que Thomas de Wouters nous présente les grandes lignes de son nouveau projet, la Fondation blan.


Un grand bazar flottant

Porté par le grain de folie qui fait le sel des débuts, il la qualifie volontiers de « grand bazar flottant complètement fou » ou de « page blanche qui reste à écrire ». On se situe quelque part entre le Bateau-Lavoir et un salon d'art à la bonne franquette. « Un lieu où l’on se retrouve, où l’on mange, où l’on boit… la vie, quoi ! »

Ouverte à tous les possibles, la fondation se rêve comme un lieu de vie, de création et de rencontre, où artistes en résidence, visiteurs et passants peuvent se croiser. « La création in situ est un enjeu majeur de notre projet et nous prévoyons d’accueillir jusqu’à 5 artistes dans nos ateliers. »

Esprit baroque et amateur d’éclectisme, de Wouters prévoit d’ouvrir ses portes à tous les vents créatifs. En plus des expositions, concerts, poésie, danse ou cinéma feront vibrer les vieux murs de cet hôtel de maître parfaitement restauré. À l’image de sa façade, de trois étages surmontés d’un jardin suspendu et d’un impressionnant cube de verre contemporain, blan aime décidément bousculer nos habitudes visuelles.


Les éléments perturbateurs de Stephan Balleux

Pour son exposition inaugurale, Thomas de Wouters donne « une carte blanche absolue » à son ami Stephan Balleux. Des caves au grenier (comprenez jardin suspendu), l’artiste bruxellois a posé ses œuvres dans une scénographie qui emprunte beaucoup à l’esthétique des cabinets de curiosités. Clowneries dans la cave à vin, cumulonimbus dans la cage d’escalier ou fausses peintures abstraites au bel-étage... « Je me suis un peu lâché », sourit l’artiste.

Avec Artificialia, il présente un corpus varié de toiles, dessins et sculptures récentes, dont la plupart ont été spécialement conçus pour les espaces de la fondation. L’occasion pour Stephan Balleux de nous parler de son « addiction aux images » et aux documents d’archives qu’il chine et collectionne depuis de nombreuses années. Ici, il s’amuse à repeindre en couleur sur une photographie en noir et blanc issue d’un portfolio d’architecture. Là, il affuble d’un nez de clown un portrait ancien trouvé dans une poubelle. Ainsi détournées par la présence incongrue d’éléments perturbateurs, ces images se drapent d’un fascinant mystère.

On retrouve également le penchant cinéphile de Balleux dans une troublante série de trois toiles inspirées par Charlotte Rampling dans Les Damnés de Visconti. Sur chacune d’elles, la même femme au regard perdu est entourée d’un essaim de volatiles. Quelque part entre Les oiseaux d’Hitchcock, le glamour hollywoodien et le bestiaire naturaliste, ces œuvres à l’étrange beauté attirent l’œil autant qu’elles le dérangent. « J’aime l’idée que cette femme suscite des émotions contradictoires, qu’elle soit à la fois féerique et dramatique », précise le peintre.

Le parcours se poursuit dans les anciennes caves de l’institution, dont le long couloir déroule une galerie de petits et moyens formats. Gouaches à la touche diluée, concrétions organiques, bas-reliefs ou peintures d’onomatopées offrent une plongée dans les expérimentations picturales récentes de Balleux.

De part et d’autre de ce corridor, de petites alcôves accueilleront bientôt les ateliers des futurs artistes résidents. Ce sont eux qui, dès l’automne prochain, couvriront à leur tour les murs et les pages blan(ches) de la fondation. De quoi assouvir la « furieuse envie de nouveauté » de son propriétaire et de tous les curieux d'art !
 

Stephan Balleux
Artificialia 
Fondation blan 
26 boulevard Général Jacques
1050 Bruxelles
Jusqu'au 1er juillet 

Du mercredi au samedi de 14h à 19h
https://www.fondationblan.org/

Mylène Mistre-Schaal

Journaliste

Historienne de l’art avec un goût prononcé pour l’art contemporain, Mylène Mistre-Schaal est collaboratrice régulière pour le magazine culturel Novo. Elle écrit également pour le city-magazine français ZUT et pour la revue Hermès. Co-autrice du livre L’Emprise des Sens aux éditions Hazan, elle s’intéresse tout particulièrement aux rapports sans cesse renouvelés entre l’art et les cinq sens. 

 

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