Après six années de recherches couronnées d’un prix européen, l’Institut royal du Patrimoine artistique (IRPA, Bruxelles) publie aujourd’hui les dernières images des peintures de Van Eyck en très haute résolution sur closertovaneyck.kikirpa.be. Ce site est dédié d’une part à la restauration de l’Agneau mystique et d’autre part à l’œuvre complète de Van Eyck, à son atelier et à ses suiveurs.
Il s’agit des images du Léal Souvenir (ou Portrait d’un homme) (National Gallery, Londres), du Saint Jérôme (Detroit Institute of Arts), du Saint François (Philadelphia Museum of Art) et de la Vierge à l’Enfant à la fontaine (collection privée, New York). Ces quatre tableaux ont été exposés au MSK de Gand lors de la grande exposition de 2020 consacrée à Van Eyck. Peu après la première vague de la pandémie, l’IRPA a pu étudier et documenter ces peintures avant qu’elles soient emballées et restituées à leurs propriétaires.
Vous pouvez à présent zoomer sur ce riche matériel visuel en ligne, tant sur les détails les plus infimes que sur les couches sous-jacentes, aujourd’hui révélées grâce à la radiographie et la réflectographie infrarouge. Bien plus qu’un vrai régal pour les yeux du visiteur émerveillé par l’extrême minutie des œuvres de Van Eyck, ce site est aussi un outil exceptionnel pour la question parfois épineuse de leur attribution. « Il existe parfois plusieurs versions d’une même composition, explique Bart Fransen, responsable du projet à l’IRPA. Nous pouvons désormais, pour la première fois, les comparer jusque dans leurs moindres détails sur la base d’images standardisées, car les tableaux ont tous été photographiés selon un protocole identique et avec le même matériel. » Il existe deux versions du Saint François : l’une est conservée à Turin (Galleria Sabauda), l’autre à Philadelphie. Bien qu’elles soient de format différent, le degré de correspondance de certains détails, à la touche picturale près, est tout simplement stupéfiant. De même, il existe deux versions de la Vierge à l’Enfant à la fontaine : l’une se trouve à Anvers (Musée royal des Beaux-Arts), l’autre à New York. « Au fond, c’est comme si on jouait au célèbre jeu des sept différences, conclut Bart Fransen. L’étude comparative est certes devenue plus aisée, mais l’interprétation des ressemblances et des différences fait encore couler beaucoup d’encre. »
L’autre nouveauté du site consiste en l’ajout de photos de l'arrière des tableaux, rarement visible pour les visiteurs de musées. Il porte parfois d’anciennes étiquettes qui nous renseignent sur les précédents propriétaires ou offre un aperçu de la structure du panneau de bois. Mais surtout, il est souvent peint à l’imitation du marbre ou du porphyre et présente des éclaboussures de peinture, qui, de près, rappellent même les peintures de Jackson Pollock.
Ce n’est qu’en zoomant sur les œuvres de Van Eyck qu’on en saisit enfin toute la beauté. Fermé à la suite d’un dramatique incendie, Bozar a réouvert, ce 28 janvier, les portes de l’exposition Facing Van Eyck. The Miracle of Detail. Cette coproduction de Bozar et de l’IRPA a été prolongée jusqu’au 14 mars. Grâce au fructueux travail de numérisation réalisé ces six dernières années, le visiteur est littéralement immergé dans l’univers de Van Eyck : des quelque vingt œuvres conservées, plus de 300 détails ont été sélectionnés. La projection est interactive, si bien que le visiteur peut explorer d’un détail à l’autre, au gré de ses envies, l’ensemble de l’œuvre picturale de Van Eyck, présentée sous la forme de cinq grandes thématiques : l’Homme, la nature, l’architecture, la lumière et la technique. Le tout sur fond d’accompagnement au violoncelle, créé spécialement pour ce projet par le compositeur belge Benjamin Glorieux. La beauté réside dans les détails. Assurément. Comme l’écrivait déjà Karel van Mander en 1604 sur la perfection du détail propre à Van Eyck : « Les cheveux des hommes, les queues et les crinières des chevaux, on peut presque les compter. Ils sont si finement peints que cela étonne tous les artistes. » Aujourd’hui encore, on ne peut que lui donner raison.
Le projet VERONA a été financé par la Politique scientifique fédérale (BELSPO), dans le cadre du programme BRAIN (Belgian Research Action through Interdisciplinary Networks) et bénéficie du soutien de Musea Brugge et de la collaboration de Closer to Van Eyck.
http://closertovaneyck.
www.bozar.be
Fondatrice
Voir et regarder l’art. Puis transformer en mots cette expérience première, qui est comme une respiration. « L’écriture permet de transmuter ce que l’œil a vu. Ce processus me fascine. » Philosophe et sculptrice de formation, elle a été journaliste entre autres pour L’Echo, Marianne Belgique et M Belgique. Elle revendique de pouvoir écrire dans un style à la fois accessible et subjectif. La critique est permise ! Elle écrit sur l’art, la politique culturelle, l’évolution des musées et sur la manière de montrer l’art. Elle est aussi artiste. Elle a fondé le magazine Mu in the City en 2014.
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